À l'orée de la ville

Jeudi 23 octobre

La soirée d’hier a viré au cauchemar. La gamine s’est révélée être une aussi mauvaise gardienne que sa sœur était mauvaise coiffeuse. D’abord, le téléphone de James a sonné sans arrêt. La première fois, c’était Fiona qui voulait savoir si elle pouvait donner du lait aux enfants avec le repas. Dès ce moment, on aurait dû se douter qu’il y avait une couille dans le potage. Mais il n’y a pas de pire sourde qu’une mère mutilée qui désire une soirée en tête-à-tête avec le père de ses enfants.

Une heure plus tard, c’est Agathe qui nous a dérangés dans les bandes-annonces pour nous dire que Lionel ne voulait pas se brosser les dents. On a regardé le film assis sur notre angoisse puis on est rentrés au pas de course. On n’avait pas à s’inquiéter pour le bonheur de nos petits : ils étaient debout devant un DVD en train de manger de la barbe à papa. James est allé reconduire Fiona sans lui adresser la parole et lui a donné son salaire en retranchant un dollar (par principe). Les enfants nous ont raconté qu’ils avaient acheté des cochonneries au dépanneur. Raoul était tout fier de m’annoncer qu’ils avaient pris l’argent dans sa tirelire. Pour l’initiative, Fiona est une championne, mais pour ce qui est du jugement, elle ne vaut pas les bottines qu’elle porte. Les enfants, eux, l’ont littéralement a-do-rée.

Ouille. Je n’ai vraiment pas assuré sur ce coup-là. Je m’en veux, surtout qu’Anne a impérieusement besoin de passer du temps avec James. Pour tenir le fort pendant ses nombreuses absences, il faudrait qu’elle ait un minimum d’intimité avec lui. Trouver une gardienne ne relève pas du domaine du loisir, mais plutôt de la santé mentale. Je n’ai pas compris ça : tu parles d’un ange gardien.