À l'orée de la ville

À une époque de sa vie, mon mari était ergomane. Jusqu’à la rédaction de ce billet, j’utilisais l’horrible « workaholic ». « Ergomane », c’est plus joli et comme personne ne sait ce que ça veut dire, on s’épargne la moue dédaigneuse. Je partage avec vous ma trouvaille (même si je m’expose à me faire lire avec une moue dédaigneuse).

Ergomane :

Personne qui accorde une importance excessive ou pathologique à son travail, à sa productivité, à ses activités professionnelles, au détriment de ses activités familiales et sociales, de ses loisirs, etc. (Antidote)

Mon mari travaillait trop, donc.

À l’époque, comme maintenant, je lui préparais de bons lunchs maison en suivant le Guide alimentaire canadien. Un jour, son assistante Nancy – une sainte femme – m’a appris qu’il les mangeait froids. Qu’il se contente de pizza froide, je peux l’accepter, mais pour le ragoût de bœuf, je ne suis plus d’accord. Pendant des mois, j’ai eu beau faire et beau dire, le Grand Homme Pressé n’avait pas deux minutes pour réchauffer les petits plats que je lui préparais avec tant d’amour.

Quand j’ai compris que la menace, la colère, l’affection ne l’atteignaient pas, j’ai décidé de me battre avec des armes beaucoup plus puissantes.

J’ai un talent caché (à part ma synesthésie). Je suis machiavélique. Je déborde aussi d’imagination. Je reste rarement passive face à une situation qui m’agace. Et un mari qui ne réchauffe pas ses lunchs, ça m’agace souverainement.

J’ai  décidé qu’il trouverait désormais des repas congelés dans sa boîte à lunch. Il a bien essayé de les manger comme ça, mais les lois de la physique le lui interdisent. Il doit donc aller à la cafétéria pour les faire dégeler. Pour rentabiliser son déplacement, il en profite même pour les réchauffer.

Lady Machiavel gagne toujours.