À l'orée de la ville

Lundi 29 juin

Lionel a eu droit à un cours d’éducation sexuelle tout à l’heure. Il croyait que les spermatozoïdes se déplaçaient sur des rayons laser en traversant des portes de métal jusqu’à l’ovule. Il n’y avait pas forcément urgence, mais comme il entre en première année au mois de septembre, je ne voulais pas qu’il s’instruise sur les choses de la vie selon les critères scientifiques de la cour de récréation. Il a été renversé d’apprendre que la graine venait des parties intimes du papa et que celui-ci la déposait dans celles de la maman. On verra plus tard les moyens de manutention.

En ce qui me concerne, c’est le premier vrai jour de congé. James et Raoul ne sont pas là, je ne travaille pas et il pleut. Je vais expérimenter une nouvelle forme de divertissement familial qui s’appelle « le jeu libre » :

— Les enfants, faites ce que vous voulez. Vous êtes deux, profitez-en. Moi, je n’ai pas eu cette chance quand j’étais petite.

Un relent de pleurnichage juvénile ?

Au retour de l’épicerie, j’ai eu le grand déplaisir de trouver une liste de nouvelles corrections dans ma boîte de courriel. Johanne me demande des retouches pour que la cohérence soit parfaite. J’ai envie de jouer les martyrs.

Non. Tu n’as pas envie de jouer les martyrs. Crois-moi.

J’en ai mon ultime convoi de ce texte. J’HAÏS corriger. C’est comme si je passais ma vie à accoucher d’un bébé sans jamais lui voir la bouille. Ça ne me prendra pas plus d’une journée, mais ce n’est pas une excuse. Si je fais chaque fois la moitié du chemin, je n’arriverai jamais au générique de fin.

Encore un peu de courage. Ça achève.