Mercredi 3 septembre
Aujourd’hui, c’est enfin l’horaire régulier pour tout le monde.
C’est une blague ! L’horaire du mercredi n’est jamais régulier puisque Lionel n’a pas d’école le mercredi après-midi. En plus, notre chauffeur ennemi-de-la-routine nous a donné un nouveau coup de chaud ce matin. Occupée par les collations, les boîtes à lunch, les sacs à dos, les cheveux d’Agathe et l’horaire à mettre en place, je n’ai rien dit quand Raoul est allé se coller le nez à la fenêtre à 7 h 15. Je me félicite encore de mon désintérêt.
Mon fils a soudain hurlé : « Il est là », et est sorti en courant. C’est quand même un monde que, pour la première fois où le chauffeur pense à nous, le seul de mes enfants à se précipiter à l’arrêt soit celui qui n’a pas à le prendre. Grand branle-bas de combat dans le bungalow : James, Lionel, Agathe et moi nous arrachions les sacs à dos, les boîtes à lunch, les manteaux et — dans une certaine mesure — les enfants. On s’est bousculé pour franchir la porte et on est arrivés tout ébouriffés devant l’autobus. Raoul se tenait sur la première marche et papotait avec le chauffeur :
— Moi, je ne vais pas encore à l’école. Je suis aux Grenouilles Rieuses dans le groupe de Rigodons. Mon éducatrice s’appelle Jeanne et mon meilleur ami, c’est Benjamin Richelieu.
Le chauffeur écoutait poliment, toutes lumières clignotantes allumées, sans se préoccuper du regard noir des automobilistes qui trépignaient derrière lui.
Ça expliquerait pourquoi il était aussi calme devant les gros yeux de James la semaine passée. Il ne les aurait tout simplement pas vus.
Quand le papa de la petite Florence nous a rejoints avec sa fille sous le bras, il s’est rangé sur le côté, a éteint ses feux et a laissé les retardataires monter à bord. James a pris le relais de la conversation :
— Vous êtes en avance ce matin. De sept minutes.
— Oui, un peu, mais ça va toujours ressembler à ça.
Je me demande comment on peut être toujours en avance. Il me semble que ça s’appelle changer l’heure.
Une fois tout le monde parti, j’ai piqué un brin de jasette avec le voisin. J’étais heureuse d’apprendre que Florence commençait sa deuxième année. Ça fera une amie pour Agathe. Je lui ai demandé pourquoi sa grande n’avait pas pris l’autobus la semaine passée.
— J’aimais mieux que la routine s’installe avant d’envoyer Florence à l’arrêt. Je ne fais pas trop confiance aux nouveaux chauffeurs.
Certaines personnes ont la sagesse de ne pas s’en remettre aux autres. La vie de leur ange gardien doit être simple. Ou ennuyante…
Même sans l’autobus (mon école n’était pas loin de chez moi; 10 minutes à pied), les matins étaient assez occupés pour ma maman: moi aussi je devais apporter ma boîte à lunch, avec mes galettes et mon jus de fruit de la passion… Héhéhé! Et, surprise: en portugais, « boîte à lunch », on dit… « lancheira » ou, quand j’étais petit, dans mon coin de pays, « merendeira »!
J’aimeJ’aime
Du jus de fruit de la passion : c’est fou! Je ne crois même pas qu’on en trouve ici. Par contre, je suis certaine que personne n’en boit à l’école primaire!
J’aimeJ’aime