La star de St-Edgar

J’ai passé un nombre incalculable d’heures sur les pistes du minuscule centre de ski de St-Edgar quand j’étais adolescente. La butte, parce qu’on ne peut pas parler ici de montagne, n’atteignait pas les 1000 pieds. On grimpait en haut grâce à deux tire-fesses que nous appelions pompeusement T-Bar (l’accent anglais est indispensable). Quand ils tombaient en panne tous les deux en même temps, ce qui arrivait parfois, nous enlevions nos skis et montions à pied.

C’était génial.

Centre de ski de St-Edgar

Ça n’avait rien à voir avec Pin Rouge, le centre de ski exceptionnel qui se trouve aujourd’hui de l’autre côté de la rivière. Mais justement parce que c’était minuscule, nos parents venaient nous reconduire le matin en traversant le pont de bois qu’une Sainte Vierge en plâtre patronnait et nous récupéraient quand le soleil se couchait. Ils pensaient peut-être que la statue étendrait aimablement sa protection jusqu’à leurs enfants. Nous avions donc huit heures de liberté totale. Nous les passions à skier bien sûr, mais surtout à faire les fous, à rire comme des baleines et à manger des sandwiches à la petite viande  accompagnées des canettes de jus de légumes. On achetait parfois des hot-dogs exquis au casse-croûte tenu par monsieur et madame Gagné. Tous les employés de la station s’appelaient Gagné. Comme tous les habitants de St-Edgar d’ailleurs (oui, j’exagère, mais pas tant que vous le croyez).

J’avais la chance d’être la cousine d’une des stars du centre. Beau comme un coeur avec des yeux bleus, des cheveux blonds et un teint bronzé, Daniel était un excellent skieur. Il avait aussi le génie des blagues idiotes. Il a failli faire mourir sa mère d’une crise cardiaque en simulant la chute du siècle. Il a dévalé la piste à toute vitesse sans bloquer ses fixations et a sauté hors de ses skis juste à côté d’elle. Je trouvais qu’il était la personne la plus drôle au monde. Ma tante avait une opinion nettement plus nuancée.

Cette semaine, il m’a envoyé cette vidéo d’un gamin qui s’amuse à lancer son ski en l’air pour le rattraper avec ses mains. Il me parlait de l’allemand du chauffeur d’autobus et disait que nous n’avions pas besoin de lire Goethe pour comprendre. J’ai cliqué sur le lien en pensant que ma mission était de faire une traduction sommaire. Je n’ai pas pu : je riais  trop.

Le ski et le bus

La vidéo est drôle bien sûr, mais si je riais tellement c’est parce que je voyais mon cousin à 15 ans. Et je suis absolument certaine que la prochaine fois qu’il chaussera ses skis, il essaiera de faire cette acrobatie. À moins qu’il ne la fasse déjà depuis belle lurette.


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